Horizons de liberté

Il y a des moments dans la vie qui nous permettent non seulement de nous reposer, mais de penser à autre chose qu'à l'avenir immédiat, que faire, des projets ou des problèmes à résoudre. Ce sont des situations qui arrivent ou quelque chose que nous organisons. Ils nous le permettent, c'est vrai, mais tout le monde ne veut ou ne sait pas en profiter. En effet le « rien » apparent, qui risque à la suite d'un choix de détente ou de repos, nous dérange et nous met mal à l'aise. Par exemple, être dans un environnement où chacun exerce une activité et n'ayant aucune responsabilité ou une position claire, un travail précis. Cette situation peut sembler très différente de celle que j'ai mentionnée plus tôt, mais ce n'est probablement pas le cas.

Ne pas avoir une responsabilité ou une urgence de travail à faire, vous permet de créer un espace dans lequel vous pouvez être vous-même et parfois aider l'inventivité et l'imagination qui ouvrent de nouvelles voies et de nouvelles relations. Ce n'est pas en commandant, en dirigeant ou en organisant que l'on pénètre dans le cœur des autres et parvient à en découvrir la richesse, qui peut devenir une grande aide pour chacun de nous ; mais écouter, questionner, aider et se rendre disponible. Cela vient du fait que nos pensées sont plus libres et creusent en nous une liberté, qui nous permet d'endurer, soit en la combattant, soit en s'adaptant, tout ce qui veut nous forcer, nous lier ou nous enchaîner. Nous avons la possibilité de laisser un espace devant nous dans lequel rien ne nous opprime, rien ne nous presse. Cela nécessite un combat contre tout ce qui veut nous forcer à nous dépêcher, à contrôler la quantité de travail accompli, au "combien" qui est souvent un fléau de nos journées et qui se mélange et grandit avec des pensées qui rejettent ce qui est et se passe . . . Ce combat de libération n'est pas une acceptation passive du mal qui nous entoure, mais une reprise des forces pour qu'il ne nous submerge pas et ne nous blesse pas.

Le : « il devrait en être autrement » ou le : « il n'est pas juste que cela soit », sont des choses qui viennent naturellement et avec raison à notre esprit et à notre cœur, mais, si nous ne les prenons pas en main et ne pas leur donner une nouvelle direction, ils nous submergent et nous frappent contre un mur. Ils ne laissent qu'un goût amer dans la bouche, sans nous avoir aidés à vivre quelque chose de positif. Libre de ces pensées, nous pouvons entrer dans la réalité, qui est ce qui nous entoure et deviner comment nous pouvons vivre et ce que nous pouvons faire qui est bon pour nous et le fait aux autres, sans être esclaves de l'injustice des autres. Cette victoire peut être le fruit du repos estival, si nous ne l'avons pas vécue comme une guerre contre tout et contre tous et si c'est un repos global de tout notre être. En effet, le vide que nous pouvons créer dans notre temps, comme dans notre vie, n'est pas toujours une perte de temps, mais il peut être une récupération d'énergie, si nous nous reposons, ou une récupération de créativité et de qualité de vie, si nous nous libérer d'être emportés par les événements, des besoins des autres ou des nôtres, du complexe d'avoir à faire de grandes choses. Lorsque Leopardi écrivit la fameuse phrase de conclusion de l'Infini : "e il naufragar mi è dolce in questo mare" (et le naufrage m'est doux dans cette mer), il ne regardait pas un panorama vaste et riche, mais une haie qui lui bloquait la vue, lui donnant la possibilité d'imaginer quelque chose bien plus vaste et bien plus beau. Et ainsi, être dépouillé de grands offices, d'honneurs et de pouvoirs, nous permet de voir la réalité au-delà des limites que ces choses nous imposent et de penser, avec le regard de Dieu, à la vraie beauté.

L'espace avec imagination ou désir n'est pas toujours une perte de temps, comme on pourrait le penser, mais une authentique recharge des batteries qui nous permettent d'être des créateurs plutôt que de simples interprètes.

Cesare Falletti

NP Agosto-Settembre 2021