l'élu

Ösel Hita Torres était un enfant de 14 mois lorsqu'il a été reconnu par le Dalaï Lama comme la réincarnation d'un homme religieux mort en odeur de sainteté et transféré par ses parents dans un monastère bouddhiste pour y vivre l'ascétisme et contemplation. A 18 ans, le jeune homme décide de quitter le monastère pour s'adonner à une joie folle sur les plages d'Ibiza, se plaignant de ne pas avoir eu une enfance normale avec jeux vidéo et snacks. Cet épisode me fait beaucoup réfléchir à la grande responsabilité des "hommes de Dieu" dans l'interprétation de la volonté divine et à la responsabilité des parents, notamment dans l'accompagnement d'un jeune vers son avenir. Aucune religion et aucun homme n'est exempt de ces responsabilités. L'Église en sait aussi quelque chose qui, ces derniers temps – comme tout au long de son histoire – n'est pas exempt de moments déconcertants. Malgré cela l'homme continue à chercher la lumière, et quand il la voit à travers le visage d'un élu tant mieux ! Mais que se passe-t-il lorsque les élus nous laissent tomber ?

Si je devais faire une liste noire des personnes qui ne correspondent pas à mes attentes un quinterno ne me suffirait pas. De Saint-Pierre à Obama, la liste serait très, très longue. Alors je me suis dit : si aujourd'hui j'étais follement amoureuse d'un artiste et de ses oeuvres et qu'ensuite je découvrais qu'il fessait secrètement des enfants, est-ce que je continuerais à aimer ses oeuvres ? Ou ma vision serait-elle irrémédiablement altérée par mon jugement sur lui ? Mon grand-père m'a toujours dit ceci : « Tu connais le ragoût de grand-mère ? Vous savez à quel point ça craint, n'est-ce pas ? Et savez-vous pourquoi quand je le mange, je suis heureux ? Cela peut sembler fou, mais cela me rappelle que moi aussi - sans aucun doute - je suis sur la liste noire de quelqu'un".


Andréa Go
NP février 2023