Les défis de Mogadiscio

La Somalie continue de lutter contre le terrorisme djihadiste. Les autres défis auxquels est confronté le pays, décimé par trois décennies de guerre civile, sont les famines et l'instabilité extérieure.

Ce sera une année décisive pour l'avenir de la Somalie. Le gouvernement du président Hassan Sheikh poursuit la lutte contre le terrorisme djihadiste d'Al Shabaab, qui, jusqu'à il y a trois ans, contrôlait les environs de Mogadiscio, mais aujourd'hui ne contrôle que des zones rurales à des centaines de kilomètres (bien qu'il conserve toujours la capacité de frapper la capitale). Les autres défis de ce pays de 18 millions d'habitants, décimé par trois décennies de guerre civile, sont les famines et les guerres extérieures. Il est crucial pour la paix en Afrique de voir si elle pourra les surmonter.

Le gouvernement de Hassan Sheikh a déjà obtenu la réduction de milliards de dollars de dette publique, convaincu le Conseil de sécurité des Nations unies d'assouplir l'embargo sur les armes et a officiellement rejoint le marché commun de l'Afrique de l'Est. En bref, des progrès ont été réalisés même s'il reste plusieurs problèmes critiques que la Somalie ne peut pas affronter seule. En commençant par la défaite du terrorisme lui-même. Le problème n'est pas les 7 à 8 mille djihadistes armés, mais le soutien généralisé des clans. Le gouvernement devra démontrer qu'il peut assurer indépendamment sa propre sécurité car la mission de paix de l'Union africaine se retirera en décembre. Et si, dans la capitale Mogadiscio, les gens ont appris à vivre avec la peur des attaques dans une recherche continue de normalité faite de chantiers et de smartphones, dans les zones rurales, environ 7 millions de personnes sont confrontées aux fléaux bibliques de la faim, de la guerre et de la maladie. L'extrême pauvreté, la malnutrition, les changements climatiques frappant particulièrement la Corne de l'Afrique - avec des années de sécheresse suivies de pluies violentes et d'inondations sans précédent qui ont dévasté l'agriculture - sont difficilement gérables individuellement, compte tenu de l'augmentation simultanée des prix des engrais et des céréales résultant de la guerre russo-ukrainienne et de la concentration de l'aide humanitaire mondiale sur ce front et à Gaza.

De plus, la Somalie doit faire face à deux séries de menaces, l'une interne et l'autre externe. La première est la corruption à haut niveau, parmi les pires au monde, qui contamine chaque segment de la vie politique et sociale; la deuxième est la pression éthiopienne pour avoir une sortie sur la mer Rouge. Le tronçon de mer est devenu stratégique pour le commerce international et la Somalie, avec la plus longue côte d'Afrique de la mer Rouge à l'océan Indien, est un acteur clé pour le contrôler. Mais l'accord entre l'Éthiopie et le Somaliland, l'ancien protectorat britannique qui revendique son indépendance depuis des décennies, de louer le port de Berbera et 20 km de littoral à Addis-Abeba, a tendu les relations entre les deux pays. Le Premier ministre Abiy s'est engagé à payer le loyer en cédant 20% de la propriété d'Ethiopian Airlines et surtout en reconnaissant le Somaliland. Mogadiscio a déclaré être prête à se battre pour défendre son intégrité territoriale, obtenant le soutien de l'Érythrée et de Djibouti, de la Turquie et des États-Unis.

Hassan Sheikh a également renouvelé l'accord de coopération politico-militaire avec Ankara tandis que l'Éthiopie, selon les Somaliens, est soutenue par les Émirats arabes unis. Abu Dhabi craint la concurrence portuaire de Mogadiscio. Quel rôle l'Italie peut-elle jouer ? Que ce soit dans l'esprit du plan Mattei ou non, nos relations historiques avec les deux rivaux peuvent être utilisées par notre diplomatie pour une médiation, tandis que nous devrions aider la sécurité somalienne non pas par la vente d'armes, mais en formant des médecins, des avocats, des architectes et des ingénieurs dans nos universités et toutes les figures nécessaires au développement, ainsi qu'en initiant des projets de coopération dans la pêche et l'agriculture, en rendant aux Somalis la grande richesse qui leur a été volée par la guerre

Paolo Lambruschi

NP Marzo 2024