Un bon samaritain

Modène, le 21 février 1944. Très chère épouse inoubliable, en ce moment suprême vécu ensemble, je t'envoie ce dernier salut, qui a toujours été la raison de ma vie. Pardonne-moi; pardonnez aussi aux autres au nom du Seigneur.

Les bons samaritains existent, chaque période historique a vu leurs noms et leurs actions. L'une d'elles en particulier offre l'occasion de leur apparition : les très tristes dernières années de la Seconde Guerre mondiale. En Italie, il y a une guerre civile, la "normalité" appartient au passé. Alfonso Paltrinieri, père de 5 enfants, est le fils d'émigrés qui ont fait fortune en Argentine, et à leur retour ils l'aident à monter une laiterie. Les temps sombres arrivent et 1944 voit l'Italie divisée en deux : le nord envahi par les Allemands et le sud libéré par les alliés. Près de l'usine Paltrinieri se trouve une ferme où se réfugient des soldats évadés des camps de prisonniers du régime. Alfonso leur donne un coup de main pour s'échapper vers le sud. Cependant, il arrive que parmi eux se trouvent des prisonniers anglais, souvent blessés. L'un d'eux est découvert et signalé aux nazis-fascistes.

En conséquence immédiate, Paltrinieri et un autre « samaritain » de Modène, l'opticien Arturo Anderlini, sont arrêtés et abattus après un procès farce, tandis que la femme d'Alfonso, Ines, est condamnée à 24 ans de prison. Ici émerge la grandeur de ce chrétien : non seulement il pardonne à ceux qui l'ont trahi et tué, mais à la veille de son exécution il exige que son fils Ernesto fasse de même : il a donné pour garder. Puis il a ajouté : « Si vous découvrez qui nous a espionnés et que vous ne leur pardonnez pas, vous n'êtes pas digne d'être mon fils. Et selon toute vraisemblance, nous savons qui nous a dénoncés. Mais que pouvais-je faire ? Comment puis-je échouer dans l'engagement pris avec mon père ?". Le bon sang ne ment pas.


Annamaria Gobbato
NP février 2022